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French Vinyl Addict 🇨🇦 un français passionné de vinyles à Québec

🎵 Il est en passe de devenir la passerelle entre la France et le Québec grâce à sa chaîne YouTube qu’il a créée en Mars 2023. En tant que français résidant sur la rive sud de Montréal, French Vinyl Addict s’est lancé le formidable défi de connecter deux cultures, tout en partageant dans la langue de Shakespeare son incommensurable mélomanie et son amour du support vinyle. Voici 50 minutes d’échange en visio autour de sa perception du paysage musical actuel, mais aussi de son expérience en tant qu’expatrié dans un pays où l’influence culturelle des États-Unis n’est jamais très loin…

Monsieur Vinyl : Ta chaîne débarqué en mars 2023. Comment cette aventure a-t-elle commencée ?

French Vinyl Addict : J’ai suivi de près l’essor de tous ces vidéastes amateurs qui ont suivi ton exemple en France. Je m’y suis investi de manière active à l’époque où je n’avais pas encore de chaîne sous le pseudonyme Snitsch. J’étais actif dans les commentaires et lors des diffusions en direct. Puis, en mars 2022, j’ai emménagé ici, ce qui a naturellement occupé une grande partie de mes premiers mois. En mars 2023, j’ai eu l’idée, en partie grâce à toi, de créer ma chaîne YouTube, car tu m’as tendu une perche en me proposant de faire une vidéo sur mon expérience. C’est à ce moment-là que j’ai pensé : « pourquoi ne pas parler un peu de mon expérience en tant que Français venu ici avec mes vinyles ?« . Je n’en ai pas encore parlé de tout ça sur ma chaîne, car ma stratégie est d’abord de me faire connaître, de faire comme tout le monde, de parler de ce que j’aime. Cependant, dans mes vidéos futures, je compte aborder les différences entre l’Europe et l’Amérique du Nord, ainsi que les habitudes que j’ai ici et que je n’avais pas forcément auparavant.

M.V. : Pourquoi avoir choisi de parler en anglais sur ta chaîne ?

FVA : Ça représente un défi personnel. J’ai toujours travaillé à l’étranger au cours de ma vie. J’ai passé beaucoup de temps en Suisse et en Allemagne, et j’ai grandi tout près de la frontière. J’avais de nombreux amis avec qui je discutais de musique, qu’ils soient Allemands, Suédois, voire même Anglais, lorsque je voyageais. C’est pour toutes ces raisons que j’ai décidé de faire ma chaîne en anglais. Bien sûr, cela peut exclure une partie des francophones qui ne parlent pas anglais, mais au moins j’essaie de créer un lien avec la communauté anglophone, et ça fonctionne. J’ai même participé à des diffusions en direct avec la ‘German Vinyl Community’. Les Français qui me suivent sont importants pour moi, et je veux rester connecté à ce qui se passe en France dans le monde des vidéos en ligne. Toutefois, je continue à produire du contenu en anglais.

M.V. : Qu’en est-il de tes premières amours musicales? Quels sont les artistes qui t’ont marqués dans ta jeunesse ?

FVA : Ça a commencé très tôt pour moi. Je suis né en 1986. A la maison, mon père écoute des albums de Styx, de Barclay James Harvest, tandis que ma mère préfère ABBA, Boney M et la musique disco. Mon intérêt pour la musique débute lorsque l’on m’offre des cassettes audios, vers l’âge de 7-8 ans. Je crois que ma première cassette était « Engelberg » de Stephan Eicher. Mais le premier véritable choc musical a lieu lorsque j’ai 9-10 ans, avec Queen, et plus précisément avec l’album « Made In Heaven ». Je découvre ce groupe grâce à mes parents qui avaient acheté beaucoup de vinyles de ce groupe durant les années 70. J’ai vraiment plongé dans cet univers musical et j’ai totalement découvert le Rock avec Queen, notamment grâce à la compilation « Greatest Hits » que j’ai écouté un million de fois. Vers l’âge de 11 ans, une autre grande découverte est celle des Beatles, qui est devenu mon autre groupe préféré.

M.V. : Et comment le vinyle est-il arrivé dans ta vie ?

FVA : À la maison, on écoutait du vinyle, et on s’est en jamais débarrassés. Mon père les a conservés, et je passais du temps à écouter les 33 tours de mes parents. À l’époque, j’accompagnais mon père en Suisse. Là-haut il y avait un petit magasin de disques que je fréquentais. J’ai commencé à racheter des albums en CD – même si aujourd’hui, curieusement, je fais le contraire ! J’ai récupéré récemment tous les vinyles de mes parents, ainsi que ceux qui ont appartenus à mes grands-parents. Je les ai fait expédié au Canada avec toutes mes affaires. Aujourd’hui, c’est un peu étrange, car il y a cette nostalgie qui s’installe. Je suis au Canada, un peu loin de tout, mais j’ai fait ce choix et tout se passe très bien. Quand j’ai un vinyle entre les mains, ça me rappelle beaucoup de souvenirs. C’est un peu comme une madeleine de Proust.

M.V. : Quels sont tes goûts musicaux actuels, et les genres artistiques vers lesquels tu te diriges naturellement ?

FVA : Personnellement, ma période de prédilection correspond à l’âge d’or du Rock, principalement des années 60 jusqu’à la fin des années 80. Cela ne signifie pas que tout ce qui est sorti après cette période n’a pas de valeur. Il y a des groupes actuels que j’écoute, et les vidéastes actuels me les font découvrir, ce qui est vraiment cool. J’ai toujours cette oreille attentive, et je demande souvent aux jeunes ce qu’ils écoutent pour rester informé. Avec les vinyles, il y a également les raretés et les groupes qui n’ont pas eu la reconnaissance qu’ils méritaient. En explorant cette époque, j’ai découvert beaucoup de sons incroyables, notamment le Hard Rock et le Blues de cette période. Au cours des dernières années, je me suis davantage intéressé à l’histoire de la musique.

M.V. : Et si tu devais comparer les deux façons d’évoquer le Rock, entre la France et le Canada, tu dirais quoi ?

FVA : Je trouve que la communauté francophone est incroyablement créative, avec d’excellentes idées. Le ‘Vinyl Show’ est une idée géniale ! Pour ma part, je m’intègre peu à peu dans la communauté anglophone. Les gens commencent à me connaître petit à petit. Je fais un peu figure d’exotisme en raison de mon accent français, mais je suis également jeune. Aux États-Unis, il y a beaucoup de gens de différentes générations, certains étant à la retraite et ayant beaucoup de temps à consacrer à leurs vidéos et leur passion. Ils peuvent en parler pendant trois ou quatre heures. Ils ont vécu cet âge d’or du Rock. Concernant la musique progressive, il existe aussi une rivalité entre les États-Unis et le Royaume-Uni. Certains sont très pointus sur le sujet. Il y a également des experts en Jazz et des passionnés de haute-fidélité. Par exemple, il y a un Anglais qui vit en Autriche et qui est un véritable expert des Beatles. Il compare toutes les versions du master en provenance du Japon, ce qui est fascinant pour les audiophiles. En somme, il y a de tout dans cette communauté anglophone. On y trouve des chaînes plus spécialisées, ça peut même aller jusqu’à mélanger le monde du vinyle avec celui de la cuisine. Cependant, ce qui les rassemble tous, c’est la passion pour la musique de qualité, et le son analogique.

M.V. : C’est comment les disquaires à Montréal ?

FVA : Justement, j’ai revu récemment ta vidéo avec Émilie-Jeanne qui en parlait et qui habite le quartier de Verdun. Pour ma part, je vis sur la rive sud, donc je ne suis pas directement au cœur de la ville, mais j’essaie de m’y rendre autant que possible. Il y a un grand pont à traverser, et il y a de nombreux endroits, notamment des restaurants, où il est possible de manger tout en ayant des vinyles à proximité. On trouve également beaucoup de vinyles dans les librairies d’occasion. Les disquaires sont principalement concentrés à Mont-Royal où vivent de nombreux Français. Il y a aussi ‘Aux 33 Tours’ qui est le plus grand magasin de vinyles de la ville, situé sur une artère principale. Ils ont une sélection impressionnante de vinyles neufs et d’occasion, avec un grand choix dans tous les styles musicaux. À l’entrée, il y a cinq ou six bacs de vinyles, et je pourrais y passer une heure et demie rien qu’à fouiller dans ces bacs ! Ils ont toujours de nouveaux arrivages, ce qui les rend vraiment intéressants. On peut trouver de tout, même de la musique folklorique alsacienne ! Montréal est une ville multiculturelle, avec ce que l’on appelle ici le ‘Free Spirit’, ce que l’on ne trouve pas nécessairement dans les autres villes. Les bacs reflètent la diversité de Montréal, puisque les résidents ont apporté leur musique avec eux. On peut facilement trouver de la musique d’Amérique du Sud côtoyant celle du folklore suisse, aux côtés de musiques japonaises. C’est vraiment impressionnant.

M.V. : As-tu des bonnes adresses, des lieux que tu préfère pour trouver des 33 tours ?

FVA : Il y a un disquaire que j’aime bien qui est situé dans une petite ville appelée Saint-Hyacinthe, à environ une demi-heure de Montréal. Ils ont une sélection plutôt intéressante. Et comme je suis également assez proche des États-Unis, près de la frontière avec le nord de l’État de New York et du Vermont, je fréquente un disquaire à Burlington qui se nomme ‘Burlington Records’, où je trouve un choix intéressant de Jazz, de musique électronique, et même un peu d’Afrobeat. On peut trouver des disques un peu plus pointus, mais pour être honnête, Montréal compte de nombreux disquaires, dont ‘Phonopolis’ pour en citer un autre qui propose également des références intéressantes.

M.V. : Est-ce que l’empreinte américaine se ressent chez les disquaires montréalais ?

FVA : Montréal est un endroit un peu particulier, car il est situé à Québec, une province francophone où les Québécois tiennent fermement à leur langue française. Cependant, il ne faut pas oublier un fait important : il y a une énorme communauté anglophone à Montréal. Parmi les Montréalais de naissance, certains sont anglophones et ne parlent pas français, car ils ont des ancêtres écossais ou irlandais, et ils ont continué à parler anglais. Il est vrai que pour eux, l’anglais est souvent plus naturel, et ils ont peut-être une aisance particulière avec cette langue. De plus, cette coexistence des langues et des cultures fait de Montréal une ville très éclectique sur le plan musical. Si vous allez chez un disquaire québécois francophone, vous pourrez sans doute rencontrer des Québécois francophones, des Français et des personnes d’autres nationalités. Par conséquent, un disquaire à Montréal doit avoir une sélection variée pour satisfaire un public qui apprécie l’éclectisme musical. Les stations de radio à Montréal reflètent également cette diversité. Il existe des chaînes de radio qui diffusent de la musique grecque, de la musique asiatique, de la musique orientale, et bien d’autres styles. Montréal est une ville où l’éclectisme musical est apprécié. C’est différent d’une petite ville américaine comme Burlington, où l’on peut s’attendre à un public plus orienté vers la musique américaine ou anglaise.