02 Juil MC Solaar ⭐ l’époque Polydor (en vinyles)
C’est un artiste important des années quatre vingt dix, parfois mal considéré par ses pairs. Il faut dire que MC Solaar a toujours entretenu sa marginalité. Ayant tenté un retour mitigé en 2017 avec l’album « Géopoétique », le rappeur poète n’a jamais été aussi prolifique qu’à ses débuts. Retour sur une période de sa vie artistique avec d’innombrables morceaux laissés en héritage à une France métissée et urbaine.
les débuts d’un pionnier
« Qui Sème Le Vent Récolte Le Tempo »
(1991, Polydor – pressage français : 511 133-1)
Véritable bombe musicale et référence française incontournable, « Qui Sème Le Vent Récolte le Tempo » est un premier album prometteur. Il faut dire qu’en 1991, le ‘rap’ en France est dans sa révolution. MC Solaar s’extirpe d’une scène avant-gardiste, inspiré directement par le son outre-atlantique nourri de Jazz.
C’est dans ce contexte que débarque ce premier opus, dirigé d’une main de maître par le frère de Sinclair (Hubert Blanc-Francard, alias Boom Bass, qui formera plus tard le groupe Cassius). C’est aussi la présence étincelante du regretté Zdar, à la fois à l’enregistrement et au mixage, qui apporte une touche particulière à l’ensemble.
Cet album atteste la rencontre entre Solaar et le deejay Jimmy Jay. Ce dernier vient de remporter le titre de meilleur DJ français au Championnat International de turntabilism, le ‘Disco Mix Club’. Ni une, ni deux : le voilà lancé dans la production d’un album, « Qui Sème Le Vent Récolte le Tempo », qui deviendra disque de platine quelques temps plus tard.
Collaborations au pays de l’Oncle Sam
Guru, « Jazzmatazz, Volume 1 » (1993, Chrysalis, pressage UK : 0946 3 21998 1 2)
Jimmy Jay, « Les Cool Sessions » (1993, Source, pressage français : 877911)
En 1993, Solaar fait un petit tour aux États-Unis le temps d’une collaboration éclair mémorable sur le premier album jazzy du regretté Guru, rappeur issu du groupe Gang Starr créé aux côtés de DJ Premier. Ainsi naît le morceau « Le Bien, Le Mal » qui se retrouvera inclus dans le très culte « Jazzmatazz Volume 1 ».
La même année, Jimmy Jay prépare le premier volume de sa compilation « Les Cool Sessions ». Immanquablement, MC Solaar y fait une apparition brillante avec le morceau « Et Dieu Créa l’Homme », aux côtés d’autres artistes que compte le tracklisting, dont MC Janik, Moda et Dan, Sens Unik ou encore Démocrate D.
L’apogée artistique
« Prose Combat »
(1994, Polydor, pressage USA : 697-124 013-1)
« Prose Combat » est la perfection que MC Solaar ne répètera pas. L’album, paru en Févier 1994, représente le meilleur moment de sa carrière. Avec zéro fautes sur toute la ligne, ce second opus – certifié double disque platine – installe définitivement la rime et le style de Solaar dans le paysage urbain francophone, pour finalement devenir un classique du rap français.
Toujours à la production, le désormais fidèle Jimmy Jay est rejoint par Zdar et Boom Bass qui définissent ensemble la signature de l’album. Réussite totale !
En guise de guests, on retrouve Bambi Cruz, Ménélik, Les Sages Poètes de la Rue, le pionnier Soon E MC ainsi que Sinclair et le bassiste Laurent Vernerey. C’est bien sûr l’incontournable morceau « Nouveau Western » qui va créer l’émulsion sur la FM, calqué sur un sample de « Bonnie And Clyde » de Serge Gainsbourg. Une trouvaille ‘BoomBassienne’ du plus bel effet.
Côté vinyle, le pressage américain intègre, au verso de sa pochette, plusieurs lignes d’introduction par l’artiste-graffeur Fab Five Freddy. Ces lignes ne seront pas imprimées sur le pressage français. Quant au pressage anglais, il incorpore deux morceaux supplémentaires (« I’m Doin’ Fine » et « Solaar Power ») ainsi qu’une relecture du morceau « Obsolète ».
Le virage sans Jimmy Jay
« Paradisiaque »
(1997, Polydor, pressage français : 533 769-1)
En 1997, c’est l’heure du troisième album, et c’est un tournant pour MC Solaar puisque l’acolyte Jimmy Jay quitte le bateau. À la production, le combo gagnant Boom Bass/Zdar continue de faire des merveilles, et c’est le regretté DJ Mehdi qui remplace Jay au pied levé. On y retrouve la chanteuse K-Reen, notamment sur le non moins célèbre morceau « Les Temps Changent ».
Mais « Paradisiaque » aurait dû être un double album, complété par une liste de chansons non retenues que Solaar prévoyait tout de même de diffuser. Réaliser un double album n’est pas vraiment dans les prérogatives de Polydor. De ce fait, Solaar et Pascal Nègre trouvent un accord qui consiste à publier ces chutes musicales sur un quatrième album qui sera publié trois mois après la sortie de « Paradisiaque », ce qui – du même coup – permettra à l’artiste de clore son contrat avec Polydor (l’artiste ayant signé pour quatre albums).
Or, trois mois après la sortie de « Paradisiaque », le label Polydor ne publie rien de plus. Jugeant que sa maison de disque n’a pas respecté les engagements, l’artiste saisit les prud’hommes et, à l’issue, gagnera le procès qui en découlera.
Le tant attendu quatrième album sera finalement distribué un an plus tard, le 21 Juillet 1998, mais sans aucune promotion (et sans pressage vinyle, sacrebleu !). En parallèle, Solaar a pris le temps de créer son propre label (Sentinel Ouest) et s’apprête déjà à sortir son premier album live… chez Warner.
Une renaissance symbolique
« Le Tour de la Question »
(1998, EastWest, pressage français : 3984 25105 1)
Le 2 Novembre 1998, Solaar dépose dans les bacs un enregistrement intermédiaire qui symbolise sa transition avec son ancien label Polydor et sa nouvelle signature chez EastWest, filiale de Warner. Capté le 11 Mai 1998 à L’Olympia, ce live regroupe l’essentiel des morceaux du catalogue Solaar tout au long de ces sept dernières années.
Durant une vingtaine d’années, les morceaux issus de ce live étaient les seules versions de l’époque Polydor que vous pouviez trouver sur les plateformes de streaming. Depuis le procès remporté par l’artiste, Polydor n’avait plus le droit de vendre ni de rééditer les quatre premiers albums de MC Solaar, même en vinyle… En 2021, l’artiste a autorisé le label à rééditer ses premiers albums, autant au format physique qu’au format digital.