27 Juil 90 000 vinyles, en immersion dans la Médiathèque Musicale de Paris
Non loin de l’église Saint-Eustache, en descendant un petit escalier, on pourrait bien ne jamais imaginer qu’un véritable trésor se cache en sous-sol. Là, dans le Forum des Halles, se trouve un lieu magique pour tout passionné de musique qui se respecte. Ce lieu, c’est la Médiathèque Musicale de Paris. Un lieu que je vous encourage vivement à visiter mais aussi à faire vivre en consultant les supports au catalogue. Allez, je vous y emmène !
Un jour d’été, pas comme les autres pour un passionné de musique que je suis ; vous le savez, le vinyle est une passion qui m’anime depuis vingt-cinq ans. En ce mois de Juillet 2018, je débarque à Paris afin d’explorer un endroit que tout mélomane se doit de visiter un jour dans sa vie. Non loin de l’Eglise Saint-Eustache, dans le 1er arrondissement, en contrebas, se trouve l’entrée d’un lieu fourni en musique, une caverne d’Ali-Baba où – chaque jour – de braves lutins tout aussi passionnés s’affairent pour conserver un trésor, celui de la Médiathèque Musicale de Paris.
La musique sous toutes ses formes et sur tous supports
Ce lieu n’est pas une grande section discothèque, comme on en croise fréquemment dans certaines bibliothèques un peu partout en France. Ici, le lieu entier tourne autour de la musique. L’adage de la maison ? « La musique sous toutes ses formes et sur tous supports ». Et, en effet, tous les supports liés de près ou de loin à la musique s’y trouvent : revues, CD, DVD, partitions, romans et – bien entendu – des vinyles.
Et ça bouge à la Médiathèque ! En 2017, pas moins de 3300 CD ont rejoint les bacs, mais aussi 800 nouveaux livres, 750 nouvelles partitions, et pas moins de 65 événements ont eu lieu au cours de l’année, dont trois émissions enregistrées sur place.
L’entrée de la médiathèque musicale de paris dans le forum des halles.
Mission : conservation !
C’est en 1986 que la Médiathèque Musicale de Paris va voir le jour. D’ailleurs, ironie du sort, elle va naître en même temps que l’avènement du numérique ; le CD débarque progressivement dans les chaumières et le vinyle ne rencontre plus autant de succès. Fort heureusement, la Médiathèque va reconnaître très tôt les qualités du support vinyle et commencer à le collecter à compter de cette année charnière, notamment de part son rôle conservateur.
La série « Telemusic », publié dans les années 70, destiné aux radios & télés.
Elle va alors rassembler tous les vinyles que les bibliothèques de la région parisienne ne veulent plus conserver. C’est d’ailleurs le seul support musical qu’elle collectait à l’époque. C’est une des raisons pour laquelle elle enregistre aujourd’hui pas moins de 90 000 vinyles entre ses murs, consultable sur demande, dont environ 600 sont proposés à l’emprunt. Ces derniers sont classés par styles et par sous-genres musicaux, allant de la musique électronique en passant par le Rock indépendant, la musique traditionnelle ou encore des musiques de films.
Faire vivre la musique
La Médiathèque Musicale de Paris est composée de plusieurs salles publiques, chacune remplissant pleinement sa fonction. La plus intéressante est celle que l’on nomme la salle Ecoute & Découverte ; c’est à cet endroit que de nombreux événements se déroulent ; concerts, expositions à thématiques, tournages télé, rencontres, etc… On peut aussi s’y poser afin d’écouter les vinyles que l’on aura dénichés au sein de la médiathèque, grâce notamment à des postes d’écoute (incluant platine et casque audio). Et pour ceux qui aiment la vidéo, il est également possible de visionner des films ou des documentaires – toujours liés à la musique.
Exposition de Patrice Caillet dans la salle Ecoute & Découverte.
Le troisième fonds d’archive patrimonial français
Je me dirige ensuite vers la salle des archives sonores. Lorsque j’arrive à l’intérieur, plusieurs blocs de machines rétro-futuristes de 5 mètres de haut y règnent en maître. Dans leur ventre, des vinyles par milliers, alignés sur des étagères rotatives pouvant contenir pas moins de 800 copies par étage. Je suis devant le troisième fonds d’archive patrimonial français, le premier étant celui de la Bibliothèque Nationale de France et le second celui des archives de Radio France (qui enregistrent, elles, pas moins de 700 000 pièces).
Tout y est magnifiquement conservé. On y trouve de la musique de films, de la musique traditionnelle en provenance du monde entier, des collections complètes, des génériques à destination des télés et des radios, des 45 tours, des 25 cm, et même une réserve Pop-Rock. Le rêve pour tout collectionneur !
Chaque vinyle est enregistré dans une base de données, consultable à même le portail internet des bibliothèques municipales spécialisées, avant d’être entreposé dans une des nombreuses tours de stockage, rangés par numéros et par ordre d’arrivée au catalogue. Un travail manuel qui anime chaque semaine les bibliothécaires. Pour couronner le tout, un système de soufflerie permet de maintenir le lieu à bonne température et assure ainsi aux vinyles une excellente condition de conservation. Ceux-là sont comme des coqs en pâte !
Ces vinyles ne peuvent pas être empruntés par le public (à l’instar des vinyles disponibles à l’emprunt dans la médiathèque). En revanche, ils vivent d’autres aventures ; ceux des archives sonores peuvent être écoutés sur place par le public ou être encore prêtés à des musées dans le cadre d’expositions ou encore à d’autres bibliothèques ou à des médias.
Au fil des années, ces archives s’agrandissent, notamment à l’aide de dons ou encore par l’achat de collections. C’est ainsi qu’elle s’est dotée de plusieurs fonds spécialisés. On peut citer par exemple le Fonds Peroy (dédié aux musiques de films), le Fonds Poilvé (dédié aux enregistrements parlés), le Fonds Stiegler (dédié aux Jazz international) ou encore le Fonds Yabuuchi (dédié à la chanson française, de ses origines jusqu’aux années soixante).
Mais le plus intéressant des fonds est sans nul doute le Fonds Arnaud. Sa particularité est de rassembler uniquement des vinyles avec des pochettes illustrées ; pas de photographies ni de montage complexe, ici on parle dessin, traditionnel ou bande-dessinée. Plus de 1000 vinyles sont ainsi stockés.
Enfin, n’oublions pas les ancêtres, nos bons vieux et fragiles 78 tours en gomme-laque qui – eux aussi – bénéficient d’un espace de stockage à bonne température. Plus de 8000 copies y sont entreposés, dont la moitié a été numérisée afin que la durée de conservation soit totale. Et grâce à la magie d’internet, ces derniers sont écoutables via la plateforme Mixcloud de la Médiathèque.
Une médiathèque ouverte et accessible
La Médiathèque Musicale de Paris rassemble certainement les supports musicaux archivés les plus accessibles de la capitale. Car, qu’on se le dise, internet n’est pas la réponse à tout ; un doute subsiste sur le nom d’un musicien ? Sur un enregistrement ? Sur un compositeur, un interprète ? En consultant les supports de la médiathèque, il se peut bien que vous trouviez votre réponse. Les musiciens, les mélomanes, les chercheurs, les étudiants, les journalistes, les humanistes ne s’y sont pas trompés puisqu’ils lui rendent régulièrement visite pour parfaire leurs recherches.
Bien qu’il soit impossible de brosser et consulter l’intégralité du catalogue de la médiathèque en une semaine (cela serait surréaliste), les possibilités restent nombreuses. Ici, celui qui ne trouve pas ce qu’il recherche aura possiblement mal cherché !
Alors, je vous conseille vivement de venir visiter les lieux et – pourquoi pas – y rester toute votre vie, tant la richesse patrimoniale qui s’y trouve est grande. De plus, l’entrée est libre pour tous et l’écoute sur place des vinyles issus des archives sonores est gratuite. Vous y découvrirez de magnifiques collections et de très belles éditions, certaines curiosités et – bien sûr – de belles raretés. Un lieu à visiter mais aussi à écouter, pour tous ceux qui portent la musique dans le cœur et dans l’âme.